Avec un film pudique et splendide sur un réalisateur en mal d'inspiration, l'espagnol fascine la Croisette.
Ce film porte le label Coup de Cœur des Cinémas Pathé et Gaumont.
Il a le regard fatigué, le cheveu et la barbe grises. Salvador (Antonio Banderas) est un homme vieillissant et solitaire. Il est cinéaste, adulé dans son pays comme ailleurs. Mais à sa gloire d’artiste, l’homme ne semble guère attacher d’importance, tant il est habité par une douleur tenace. Des souffrances physiques invalidantes, un passé qui le hante à peine les yeux fermés, une paralysie créatrice l’enferment dans une mélancolie profonde, qui n’est pas sans rappeler celle de Julieta, l’héroïne du précédent film de Pedro Almodóvar. Mais ici, loin du souffle romanesque qui structurait Julieta, Douleur et Gloire frappe par sa retenue toute singulière. Car dans le visage intense d’Antonio Banderas, se dessine en filigrane l’autoportrait du réalisateur. Douleur et Gloire raconte un passé qui refait surface. La douleur profonde de Salvador se loge dans ce temps révolu, si fondateur, qui détient toutes les clés de son identité d’homme et de cinéaste. Les premiers émois et les amours passées, les idoles et lectures de jeunesse, la pureté des paysages ruraux… Dans la vie de Salvador, histoires anciennes et actuelles se croisent et se rejoignent tandis que fiction et réalité s’entremêlent, chaque expérience devenant matière à création. Il y a surtout cette silhouette indélébile, celle de la mère disparue, dont l’absence constitue la douleur la plus perçante. Penélope Cruz incarne cette mère idéale et idéalisée, à la fois naturelle et belle comme une star de cinéma. « Les mères ne sont pas l’affaire d’un temps. Elles n’ont besoin de rien de particulier pour être essentielles, importantes, inoubliables », écrivait Almodóvar à la mort de la sienne. Presque vingt ans après avoir écrit ces mots, il livre une vibrante déclaration d’amour à travers ce portrait d’un fils inconsolable et une magnifique démonstration que l’art vient sublimer toutes les douleurs.
Découvrez la bande-annonce du film :
Les 3 bonnes raisons d'y aller :
1. Pour le style Almodóvar
Couleurs chatoyantes, photographie lumineuse, décors enchanteurs… Typique des films du cinéaste, cette esthétique chaleureuse et vibrante se marie ici à merveille à son humour sans pareil. Une mise en scène à la fois grave et légère, tout en poésie et délicatesse.
2. Pour la magie du cinéma
Sur la toile blanche, Salvador trouve des alter ego à sa souffrance – Marilyn Monroe dans Niagara, Natalie Wood dans La Fièvre dans le sang – et confronte sa propre mortalité à la longévité de son oeuvre. Dans Douleur et Gloire, vie et cinéma vont de pair inévitablement.
3. Pour Antonio Banderas
Après l’irrésistible Attache-moi et le ténébreux La Piel que habito, l’acteur décroche ici le plus grand rôle de sa carrière. En artiste fragile et dépressif, son simple regard suffit à bouleverser puis à ravir le spectateur, lorsque dans ses yeux noirs de chagrin survient une lumière espiègle.